Reporterre – Gaspard d’Allens – 24 Juillet
« Overdose d’autoritarisme », « adoption hâtive de lois », « politique absurde »… Penseurs telle Barbara Stiegler, associatifs, défenseurs des libertés, syndicats, politiques s’inquiètent des mesures liberticides de l’exécutif. Car avec le passe sanitaire, un cran de plus a été atteint dans le contrôle des corps et des esprits.
Dans quelle société avons-nous basculé ? Il est difficile aujourd’hui de mesurer toute l’ampleur des conséquences du discours d’Emmanuel Macron, lundi 12 juillet 2021. Mais, face à la quatrième vague de Covid-19, le gouvernement semble déjà avoir choisi sa voie avec le triptyque menace, chantage et répression.
Le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire a été adopté à l’Assemblée nationale vendredi 23 juillet au petit matin, à 117 voix pour, 86 contre, après une nuit de discussions houleuses. Il prolonge l’état d’urgence de trois mois supplémentaires, jusqu’au 31 décembre 2021 ; étend l’obligation de présenter un passe sanitaire à l’entrée de très nombreux lieux et évènements — restaurants et lieux de loisirs, transports publics de longue durée et même hôpitaux — et pour de très nombreux professionnels, assortie de sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement pour ces derniers ; oblige tous les professionnels des secteurs médicaux et du soin à se faire vacciner, sous peine de licenciement ; et force à un isolement strict de 10 jours les personnes testées positives au Covid-19, sous peine d’amende voire d’emprisonnement en cas de récidive (lire notre appui « Que dit le texte de loi »).
Depuis qu’Emmanuel Macron a annoncé ces mesures, lundi 12 juillet, un mouvement populaire a émergé (qu’il est caricatural de réduire aux indignes références à la Shoah). Des institutions et des associations sonnent l’alerte. À l’Assemblée nationale, des élus de gauche expriment leur inquiétude. De nombreux intellectuels s’interrogent aussi sur cette évolution liberticide depuis l’apparition du virus. Nous avons plongé dans un régime politique inédit, disent-ils. La philosophe Barbara Stiegler l’a baptisé « la Pandémie ». Celle-ci n’est pas tant la propagation d’un nouveau virus qu’un mode de gouvernement : « Un continent aux contours flous et évolutifs qui risque de durer des années et pourquoi pas des siècles et des siècles », écrit-elle dans un tract publié aux éditions Gallimard. Notre société est en train de muter et les dernières annonces du président de la République marqueraient, selon le site Lundi matin, « le parachèvement historique de la société du contrôle, du monde cybernétique et de la smart-city ».